Un peu moins de huit mois après le début des travaux, la protection du port de La Flotte prend vraiment tournure.
En milieu de semaine dernière, la porte anti-submersion a été posée. Deux convois exceptionnels ont livré la porte en deux parties.
Un moment spectaculaire, mais finalement pas plus que tout ce qui a été mis en oeuvre précédemment pour en arriver là. Ce chantier est vraiment hors normes !
Je vous propose de découvrir les différentes étapes que les équipes ont franchies, durant ce mois d’avril, pour préparer l’arrivée de la porte.
VENDREDI 1er AVRIL. Le temps est clair, il fait beau. Les conditions météo sont favorables, le chantier avance vite.
D’une semaine sur l’autre, l’évolution est tangible. Sur le môle Est, destiné à recevoir la porte, les dernières pièces des coffrages qui ont servi au béton, sont retirées. Le môle finit d’être mis à nu. L’entreprise Rouby, chargée de la partie porte coulissante proprement dite, est à pied d’oeuvre. Deux rails d’étanchéité de la porte, en contre-bas et sur le môle Nord, sont déjà posés.
C’est encore un sacré challenge de Génie civil pour que tout soit ajusté parfaitement. Le rail du môle Est est à terre, en attendant que les ferrailles soient cisaillées. Ce rail doit s’emboîter au millimètre près dans l’édifice.
Je continue à être impressionnée par la complémentarité évidente des équipes, dans cet espace si clos.
Oh ! Le môle Est présente un trou à gauche ! Il se distingue maintenant très clairement. C’est un tunnel-caniveau. Il permettra d’évacuer l’eau et la vase du port lorsque les vannes seront ouvertes. La porte doit être activée régulièrement, une fois les travaux terminés.
De l’autre côté, sur le quai de Sénac, près du marchand d’huîtres, un bâtiment est en construction. Dans leur langage, les ingénieurs du Génie civil appellent cela un édicule. Ce sera le poste de commandement électrique de la porte. Il est prévu un groupe électrogène de secours, si besoin, et également un commandement manuel pour le cas où… Pour le moment l’édicule en est à ses fondations.
Sur le môle Est, les maçons poursuivent le travail d’habillage en pierres blanches. Ils sont arrivés en haut. J’imagine leur contentement…
MARDI 5 AVRIL. Le vent est terrible, il n’effraie pas pour autant les oiseaux.
Le travaux d’ajustements se poursuivent. Leur précision est assez incroyable, en regard de la dimension de cet ouvrage.
LUNDI 11 AVRIL. Le temps est doux. L’eau du port présente des traces de mousse verte.
Cela semble signifier que l’eau est douce et pas très salée.
Ça y est, le rail vertical du môle Est est posé devant la chambre de la porte. On sent les dernières mises au point. Il reste une semaine avant que les deux parties de la porte ne soient livrées. Le planning est tenu.
Pendant ce temps, l’édicule du poste de commande prend forme. Le môle Nord commence à se couvrir de pavage. Et de même, sur le môle Est, on en est au jointage des pierres.
Encore une fois, il faut saluer le formidable travail accompli par les équipes du chantier. Comme pour toutes les constructions de digues, quasiment tout se fait à la main, avec régularité et patience.
LUNDI 18 AVRIL. La porte va arriver. C’est assurément l’événement de la semaine !
Aujourd’hui, l’odeur ambiante de l’iode est terriblement forte. Sans doute les vents portants…
Le chantier suit son cours posément, mais assurément. Dernières touches de maçonnerie, derniers ajustements dans la chambre de la porte. La mini-pelle apporte de la terre pour combler le pied du rail d’étanchéité du bas de la porte.
Le jointage des pierres du môle Est est quasi terminé. Et le parement de pierres du môle Nord se poursuit à bon rythme.
La perspective depuis l’intérieur du chantier est totalement différente de celle que l’on voit depuis le haut. Autant le chantier paraît profond lorsque on le regarde d’en haut, autant il me paraît finalement pas si gigantesque vu du bas. Presque tout petit ! C’est d’ailleurs incroyable, de constater de près ce que les équipes vivent quotidiennement dans cet enceinte close.
Quand je rentre dans le tunnel d’évacuation des eaux, j’ai l’impression de rentrer dans le labyrinthe d’une pyramide d’Egypte. Etroit, profond, un passage mystérieux, mais qui aura une utilité évidente. L’eau et la vase doivent circuler à l’intérieur de la porte. Au besoin, il permettra de faire baisser l’eau du port lorsque la porte sera fermée. Dans le langage Génie Civil, on appelle cela une vantelle. J’apprends toujours de nouveaux mots…
Sur la partie gauche du môle Est, un rideau de palplanches a été posé. Il va rester définitivement en place, il ne sert pas à protéger le chantier, contrairement aux autres palplanches qui seront démontées très bientôt. Quand tout sera fini, il ne sera plus visible, il sera recouvert d’eau et de vase. Il sert comme butée vers la descente dans le port.
MARDI 19 AVRIL. La grue de levage pour la porte a été acheminée par convoi exceptionnel. Les deux grues sur le port de la Flotte se voient de loin.
Demain, jour J.
En vidéo, voici un résumé d’un mois de travaux de préparation, avant l’arrivée de la porte anti-submersion.
MARDI 20 AVRIL. LA PORTE EST LA !
Elle est livrée en deux parties. Le matin, 9 heures, la première moitié qui constitue le bas. L’après-midi, à 13h30, la seconde moitié qui constitue le haut. Au total la porte pèse 50 tonnes. 25 tonnes pour chaque morceau. Ils n’ont pas la même forme : le premier est plus haut, le second est plus long.
L’entreprise Rouby l’a fabriquée dans son atelier de Cognac. Elle est en acier. Une belle technologie ! La porte est ensuite partie se faire peindre en région parisienne, avant de revenir à l’île de Ré. La peinture est épaisse, spécialement adaptée à l’ambiance marine, elle est partie pour durer au moins 30 ans. La porte fera l’objet d’un nettoyage régulier. Pour la manoeuvrer électriquement, il faut compter dix minutes. Ce qui laisse un temps suffisant pour agir, en cas d’alerte submersion, déclenchée par la Préfecture.
Le matin, montre en mains, la manoeuvre du matin nécessite deux heures. Le convoi exceptionnel a un peu de mal à se faufiler un passage sur le port, avec son plateau bien bas. Heureusement le camion est doté de roues motrices, et le chauffeur est habile.
Plusieurs poteaux gênent le virage du camion. Vite fait bien fait, les équipes réagissent au quart de tour. Exit deux poteaux en ferraille ! La marche arrière, quai de Sénac, est impressionnante, au beau milieu des tables des restaurateurs. Le boulonnage des pattes de positionnement des grosses chaînes sur la partie haute de la porte, par l’équipe de Rouby, prend un certain temps. Tout est calme et posé. Il est sûr que ces chaînes doivent être bien attachées, ça pèse lourd cette histoire de porte… A 10h47, les conversations et remarques en tout genre s’arrêtent. Le silence est perceptible. Les appareils photos crépitent. Ahhhhhh ! La porte s’élève au dessus du port flottais. Le moment est historique, nous ne le verrons qu’une seule fois.
A 11h01, elle est positionnée dans la chambre du môle Est. Grand, grand, bravo !
Pendant cette matinée, il n’y a guère de temps mort. En vidéo, voici quelques moments clés de cette matinée :
L’après-midi, épisode n° 2. Un second convoi exceptionnel arrive sur le port de La Flotte à 13h37. La manoeuvre est plus aisée, le plateau du camion est positionné plus haut. Ce morceau est différent, et à l’oeil il est vrai qu’il apparaît bien plus long que le premier. En deux temps trois mouvements, le camion atteint sa destination finale, quai de Sénac.
La météo se gâte. Juste le temps pour l’équipe de Rouby de positionner les chaînes pour le treuillage. De loin, je trouve que ce morceau a la forme et la couleur d’un paquebot.
Les équipes du conseil départemental, qui ont travaillé sur ce projet du port de La Flotte sont là. Sont présents aussi tous ceux des entreprises qui oeuvrent sur ce chantier, voire les mêmes qui oeuvrent sur d’autres chantiers de digues de l’île de Ré : Coda-Etchart, Ré-TP, et l’entreprise Bonnet. Tout comme ceux de la Communauté de Communes. Au bout du compte, lorsque les travaux seront terminés, c’est la CDC qui va devenir gestionnaire de l’ouvrage, avec tout ce que cela implique en terme de responsabilité et de coût financier.
Ce chantier s’inscrit dans les PAPI (Programme d’Actions et de Prévention des Inondations) de la Charente-Maritime, et pour nous particulièrement de l’île de Ré. Il faut rappeler que ce chantier, comme tous nos chantiers de digues, est financé à 40 % par l’Etat, 20 % par le Département, 20 % par la Région et 20 % par la CDC.
Ce moment inédit de la porte restera gravé dans les mémoires.
Et la pluie tombe, bien drue, lorsque cette deuxième partie de la porte est ajustée sur la première. La porte est baptisée entend-on ici et là…
Le port s’est vidé, la pluie a chassé tous les spectateurs. Les irréductibles de protection du littoral rétais restent sur place, et applaudissent vivement la performance et la précision de toutes ces gigantesques manipulations.
Voici encore une autre vidéo à visionner pour vivre l’événement de la seconde partie de la porte, comme en direct :
La porte mesure 14,40 mètres dans sa partie haute, et 12,10 mètre dans sa partie basse. Son épaisseur est de 1,10 mètres. Sa hauteur totale est de 6,80 mètres.
Maintenant que la porte est dans sa gangue, le travail n’est pas terminé. Au bas mot, il va falloir une semaine pour souder les deux éléments. L’entreprise Rouby oeuvrera en vase clos, à l’intérieur du môle.
MERCREDI 21 AVRIL. Dominique Bussereau, président du Conseil départemental visite le chantier.
La Mission Mer du Département est maître d’ouvrage. La direction des Infrastructures du Département, en l’occurrence l’agence territoriale d’Echillais dirigée par Didier Henry, est maître d’oeuvre.
Les journalistes nationaux sont là. Avec ses particularités, le chantier de La Flotte ne laisse pas indifférent… La département de la Charente-Maritime se dote de digues ? Ah ! En voici une nouvelle intéressante ! Pourtant cela fait trois ans que la protection de l’île de Ré a débuté, avec la reconstruction de la digue du Boutillon.
A bientôt pour la suite de ce chantier, qui depuis huit mois, est un vrai feuilleton.