Combien d’anguilles dans les marais ?

Avez-vous une idée de la vie et des moeurs des anguilles qui logent dans les marais de l’île de Ré ? La semaine dernière, les Ecogardes de la Communauté de Communes ont procédé à un inventaire scientifique de la population de ces animaux marins.

Anguilles des marais de l'île de Ré

Vendredi 26 septembre, en suivant les équipes sur le terrain, dans des marais aux Portes-en-Ré, j’ai beaucoup appris sur ces petites bêtes et la façon dont se déroulent les comptages et leur utilité. L’espèce est menacée, car en très forte régression.

Ecogardes dans les maraisEn 2010, la Commission européenne a approuvé un plan de gestion de l’anguille en France. En 2012, l’Agence de l’Eau, le Conservatoire du Littoral et la Communauté de Communes ont signé le Contrat Territorial volet Milieux Aquatiques (CTMA) avec pour objectif la mise en place d’une approche globale et cohérente de la gestion des zones humides sur l’île de Ré.

 

Marais de l'île de Ré

 

Parmi les projets du CTMA figurent justement la restauration des ouvrages hydrauliques. Celle-ci va permettre la réhabilitation des corridors écologiques et donc le déplacement des populations d’anguilles au sein des marais.

 

En première phase du projet, les Ecogardes procèdent donc à un état des lieux dans une vingtaine de bassins : le nombre d’anguilles dans les marais, leur état sanitaire, leur stade de développement, leur grosseur. La taille de leurs yeux et de leurs nageoires sont aussi mesurées. En parallèle, la température des marais, leur hauteur d’eau, la salinité, sont répertoriées.

Pour compter les anguilles il faut d’abord les attraper au moyen de verveux, de grands filets utilisés habituellement pour la pêche de loisirs. Nous savons tous que l’anguille n’est pas facile à saisir, elle file entre les doigts ! Pour les endormir et afin de les manipuler aisément sans leur occasionner de stress, elles sont déposées dans de l’eau additionnée d’eugénol, ça sent le clou de girofle comme chez le dentiste… Une fois inventoriées, elles sont mises en bac de réveil dans l’eau du marais avant de rejoindre leur milieu naturel. La température des marais, leur hauteur d’eau, la salinité, sont aussi répertoriées.

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Ce jour de comptage, les anguilles relevées étaient à différents stades de leur développement : des petites encore jeunes, des anguilles jaunes, couleur qui indique que la bête est en période de croissance et des anguilles argentées dont les yeux sont plus gros, la bouche plus petite, le dos  noir, le ventre blanc avec un trait noir, dites en phase d’argenture et donc quasi prêtes à quitter les marais pour partir se reproduire. Le comptage est rapide, précis, pour éviter tout stress à l’anguille. Il est soumis à autorisation préfectorale de pêche scientifique, avec des règles strictes à respecter.

L’équipe des Ecogardes s’appuie sur l’expérience et les méthodes du CREAA, Centre Régional d’Expérimentation et d’Application Aquacole, basé à l’île d’Oléron, pour mettre en place un protocole adapté au territoire rétais. Pour en savoir un peu plus sur l’anguille, j’ai interrogé Eric Buard, chargé de mission au CREAA, qui travaille pour la restauration et la sauvegarde des poissons migrateurs au sein de la Cellule Migrateurs Charente Seudre. L’anguille n’a pas encore dévoilé tous ses secrets…

Quelle est la longévité d’une anguille ? De 5 à 15 ans.

Comment reconnaître un mâle d’une femelle ? Cela n’est pas possible à l’oeil nu. Le mâle est plus petit que la femelle, il mature plus rapidement et devient géniteur vers cinq ans, il est alors prêt à repartir pour aller se reproduire puis mourir dans la mer des Sargasses. Sa taille maximum est de 45 cm. Lorsque l’anguille est plus longue et grosse, c’est forcément une femelle.

Où se trouve la mer des Sargasses ? En Atlantique nord, en face de la Floride. C’est la seule mer au monde qui n’a pas de rivage. C’est une zone calme, sans vent ni vague, large de 1100 km et longue de 3200 km. Sa particularité : elle est très salée, son milieu est pauvre, à sa surface s’accumulent des algues flottantes, les sargassium,  d’où le nom de cette mer. Les anguilles européennes viennent y pondre leurs oeufs. Les larves y croissent pour se diriger ensuite vers les côtes de l’Europe. Les anguilles nagent 5000 kms pour aller là-bas, en gros il leur faut une année, et pour les civelles autant de temps pour arriver chez nous.

Quand partent-elles ? Quand elles sont prêtes à se reproduire et donc lorsqu’elles ont atteint leur niveau de maturité. Lorsqu’elles sont en phase d’argenture, cela signifie qu’elles se transforment pour devenir fécondes.

Qu’est ce-qu’une civelle ? C’est la larve de l’anguille, elle est translucide. Elle mesure moins de 12 cm. Sa pêche est totalement interdite aux amateurs. Seuls les pêcheurs professionnels, disposant d’une licence, y sont autorisés, dans le cadre d’une pêche réglementée.

Y a t-il des dates de pêche pour l’anguille ? Du 1er mai au 30 septembre la pêche est autorisée, l’anguille doit mesurer au moins 12 cm. Elle est un morceau de choix, apprécié par bien des gourmets qui la préparent en matelote, en sauce, ou grillée sur des sarments de vigne.

En vidéo, voici quelques images tournées dans les marais lors des comptages.


Au printemps 2015, des travaux seront entrepris pour faciliter la circulation des anguilles dans les marais. De nouveaux comptages seront ensuite faits dans chaque bassin déjà mesuré afin d’ évaluer l’impact des ouvrages et comparer les évolutions des quantités. Nous n’avons pas fini d’entendre parler des anguilles de l’île de Ré…

 

 

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