Pelouses rivedousaises à papillon rare

A Rivedoux, au lieu-dit le Défend, il est une terre propice à l’azuré du serpolet, un joli papillon rare, une espèce protégée dans toute la France.

Rivedoux - Pelouse à papillon Azuré du serpolet - 13 mars 2018
13 mars 2018.

En 2014, l’inventaire du patrimoine naturel de l’île de Ré a révélé sa présence à l’île de Ré.

Azuré du serpolet - Photo CDC Ile de Ré
Photo : CDC Ile de Ré

L’insecte ne se développe que si plusieurs facteurs sont réunis : une plante hôte, du genre thym serpolet, ou bien de l’origan + une fourmi hôte, du genre Myrmica.

A Rivedoux, il existe justement des friches sèches, dans lesquelles l’origan se développe à l’état sauvage, et où vit la fameuse fourmi.

Rivedoux - Pelouse à origan - 13 mars 2018

Le cycle biologique de ce papillon est particulier et étonnant.

En ce moment la chenille du papillon est bien au chaud, enfouie dans la terre. Elle est confortablement installée dans la fourmilière, depuis septembre de l’année dernière.

Les papillons vont naître en juin et jusqu’à fin juillet. Les femelles pondent alors sur les fleurs de l’origan. Les oeufs se transforment en chenilles. Elles ne restent pas longtemps dehors, elles s’alimentent de la plante, avant que les fourmis ne les entraînent dans leur fourmilière. La chenille du papillon y reste environ neuf mois, elle se nourrit des larves des fourmis. En échange, elle secrète une substance, le miellat, qui attire et nourrit la fourmi.

Elles ont besoin l’une de l’autre, en parfaite symbiose semble-t-il. Mais jusqu’à un certain point… A un moment donné la chenille du papillon doit sortir rapidement de la fourmilière. Sinon la fourmi qui l’a élevée pendant de longs mois pourrait la dévorer.

Cycle biologique de l'azuré du serpolet - mars 2018
Source CDC.

 

Comment les papillons ont-ils été inventoriés ?

“ Le jour J, des papillons sont capturés. Un numéro est marqué sur leurs ailes. Le lendemain, on re-capture et on marque de nouveau. Et ainsi de suite pendant deux mois. On peut ainsi constater si un papillon identifié est bien toujours là ” explique Yvan Sionneau, responsable des Ecogardes de la Communauté de Communes.Yvan Sionneau - Chef Ecogardes CDC - 13 mars 2018“ Ici à Rivedoux, nous avons répertorié deux populations distinctes, au nord et au sud de la route départementale. 120 individus ont été identifiés. Mais de chaque côté de la route, nous nous sommes aperçus que les populations d’azuré du serpolet n’avaient que peu d’échanges entre elles. Pendant les deux mois d’études, seuls trois papillons ont fait la navette entre les deux spots ”.

Ah… Les azurés du serpolet de Rivedoux-Sud et ceux de Rivedoux-Nord ne se mélangent pas, et pourtant ils n’habitent pas loin les uns des autres !

A la suite de l’inventaire, les pelouses à origan ont été répertoriées puis cartographiées. Un plan d’action a été mis en place pour les dix ans à venir par l’équipe Environnement de la CDC.

“ Nous avons défini des mesures de gestion : quelles actions à mener, sur quelles parcelles, et à quels moments. En 2018, nous avons décidé de débroussailler des pelouses au Défend, de façon à ce que l’origan puisse facilement se développer. L’année prochaine, il y en aura d’autres. Ces parcelles ont un enjeu environnemental ”.Carte des pelouses à origan - CDC - Mars 2018

 

“ Nous entretenons l’habitat de ce papillon pour préserver ses milieux favorables. L’espèce est plutôt rare. Elle est considérée en danger sur la liste nationale. En Poitou-Charentes, elle est en déclin, car son habitat est menacé, il disparaît en raison de l’urbanisation et de l’évolution naturelle des milieux. Elle est aussi inscrite sur l’annexe 4 de la directive Habitat de l’Union Européenne, et sur la liste rouge de l’IUCN (Union Internationale pour la Conservation  de la Nature) ”.

Mi-mars, un engin est passé par là. Le printemps est la période idéale, celle où les jeunes pousses d’origan sortent leur tête. “ La machine permet de rajeunir le milieu. Si nous n’étions pas intervenus, peut-être que dans quatre à cinq ans cet habitat naturel favorable n’existerait plus, et le papillon aurait disparu ”.

L’entreprise Environnement 41, basée à Blois, est spécialisée dans le Génie écologique. “ La machine est adaptée à ce type de travaux. Ses passages sont limités. Elle a moins d’impact que même les pas de l’homme. Elle évite de dégrader la fourmilière. Elle broie et ramasse les résidus, qui sont évacués vers une plateforme de compostage ” poursuit Yvan.

Ce diaporama nécessite JavaScript.

“ L’objectif est qu’au printemps, la ronce reprenne moins, que nous ayons plus d’origan, donc plus de ponte et plus de chenilles, et a priori plus de papillons. Ce devrait être un cercle vertueux ”.Rivedoux - Débroussaillage au Défend - 13 mars 2018

Cet origan est comestible pour le papillon et même pour l’homme. “ C’est le même que celui qui sert de garniture pour la pizza ! ” ajoute l’Ecogarde avec humour.

Ces parcelles à origan appartiennent au Conservatoire du Littoral qui en a confié la gestion à la CDC. Elles couvrent sept hectares, définitivement dédiés à l’environnement pur, aux espaces naturels. Elles ne peuvent donc pas être consacrées à des activités agricoles, telles vignes, pommes de terre ou maraîchage.Rivedoux - Débroussaillage au Défend - 13 mars 2018

On sait combien l’agriculture est une composante essentielle du territoire de l’île de Ré. Comment concilier enjeux environnementaux d’un territoire multiplement classé et activités professionnelles ?

Depuis trois ans des réunions de travail ont réuni la CDC, le comité Cigale des agriculteurs Rétais et les acteurs de l’environnement. Collectivement les parcelles à enjeux environnementaux ont été définies, celles où les habitats naturels et les espèces (oiseaux, insectes et petites bestioles) doivent être préservés. Ces terrains sont essentiellement privés, voire appartenant au Département.

Pour chaque commune de l’île de Ré, le service Environnement de la CDC a établi une cartographie, à l’échelle cadastrale, des parcelles situées dans les zones non constructibles. Avec pour chacune, la précision de son affectation : environnementale ou professionnelle. En plus des terres actuellement exploitées par l’agriculture (1720 hectares), près de 480 hectares restent à exploiter. Les terrains à vocation environnementale représentent 437 hectares.

L’ensemble de ces cartes seront intégrées dans le futur PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal) qui devrait être abouti fin 2019.

Laisser un commentaire