Pour saluer la fin de saison, les sauniers de l’île de Ré organisent une grande fête.
Cette fête a une particularité, elle n’a pas lieu tous les ans. La dernière remonte à 2014. « Uniquement les années où il ne pleut pas en septembre », s’amusent à dire les sauniers. Il faut dire que la météo leur a été, à chaque fois, favorable. Ils en sont à la 3ème édition, et il a toujours fait un temps radieux.
Samedi 17 septembre, la fête présente une singularité. Elle est pour la première fois organisée par l’APSIR (Association des Producteurs de Sel de l’île de Ré), qui regroupe l’ensemble des sauniers : ceux de la Coopérative (ils sont 65) + les indépendants (ils sont une trentaine). L’APSIR est en outre porteur de la demande d’obtention de l’Indicateur Géographique Protégé (IGP), qui sera marqueur du sel made in Ré.
Le programme est dense, car la fête va durer de 10 heures du matin, jusqu’à la nuit. Les sauniers ont de l’énergie, semble-t-il !
Elle va associer la découverte du métier et des envies culturelles et artistiques. Plusieurs associations rétaises y participent, ainsi que des bénévoles amis des sauniers.
Quatre sauniers-chevilles-ouvrières gèrent l’organisation de la manifestation : Aurélie, Pascal, Hervé et Brice.
Brice a créé la jolie affichette et le flyer. Bravo le saunier-graphiste ! Mais il semble avoir oublié un oiseau du marais dans son dessin ! Il y a bien le gentil tadorne, l’élégante avocette, et la gracieuse échasse. Mais est donc le goéland-chieur-ravageur-de-marais ? Rassurons-nous, il figure sur la banderole posée à La Passe.
La fête se passe sur le port d’Ars, sur le quai devant l’ancienne DDE, pour la partie stands, danses traditionnelles, ateliers créatifs, démonstration de confection de paniers en osier, et musique en fin de journée.
L’Ecomusée du marais Salant, vendra des livres consacrés au sel. Du sel sera proposé à la vente. Pour la première fois, seront mélangés le sel des coopérants et celui des indépendants. Les sachets seront marqués d’une étiquette spéciale. Nul doute, ces sachets seront deux collectors : un pour la fleur, un pour le gros sel !
Quant aux enfants de l’école, ils ont confectionné des sachets en tissus, qu’ils vont vendre, au profit de leur super projet intitulé Je… Tu… Île… Isabelle, la couturière d’Ars, les a aidés au cours d’un atelier couture. Il ne faudra pas surtout pas oublier d’acheter un de leurs sachets.
Sur le quai également, il y aura à manger (bio), et à boire, avec la buvette.
La fête se passe également dans les marais avoisinants, situés juste derrière du port, dénommés La Chabossière, Les Moines, Les Salines… C’est là que se dérouleront la balade contée, la visite guidée le charroi de sel à dos d’âne, et l’atelier Land Art.
Une crieuse de l’île de Ré fera le lien entre les différentes animations. Trois boites à criée, seront mises à disposition du public. N’hésitez pas à y déposer votre message, pour qu’il soit annoncé. Messages humoristiques, dictons autour du sel, tout est permis. Il peut y avoir de belles surprises.
C’est aussi dans un marais qu’évoluera la troupe d’Anne-Laure Nivet, Contempo Ré Danse. Elle sera accompagnée d’une pianiste, qui a spécialement créé la musique des chorégraphies.
Voir ces danseuses dans les marais est un moment fort. Je les ai regardés évoluer par deux fois lors des précédentes éditions de cette fête. J’ai été époustouflée par la qualité de leur prestation, et par la magie et la poésie dégagées dans ces lieux hors du temps. Avec en plus un piano, cette année, je pense que ce devrait être encore une belle page de sensations.
Sur le marais, il y aura aussi le choeur de femmes Iavnana ! A capella, elles interprètent des chants du monde.
Dès lundi, l’artiste Myriam Roux arrive sur le marais de la Chabossière pour commencer sa création en osier Land Art. C’est la première fois que le land art s’invite sur un marais. « Trop class ! », affirme Aurélie la saunière.
A voir la bonne humeur affichée par les sauniers organisateurs, ce 3ème millésime est prometteur :
Mettre le sel de l’île de Ré en valeur, c’est ce que recherchent les sauniers au travers cette fête. Et partager avec le public, en le faisant pénétrer au coeur de leur univers quotidien, pour mieux faire connaître leur métier ancestral, en ces Journées du Patrimoine. Un patrimoine naturel !
La fête est intitulée le Grand charroi. Le charroi c’est le moment où les sauniers mettent à l’abri leur production de l’été. Du sel, il y en a en abondance cette année. Tant mieux. Et pourtant il a fallu attendre début juillet pour voir les premiers cristaux de sel se former.
L’année 2014 avait été catastrophique. La Coopérative n’avait pu stocker que 400 tonnes de gros sel. En 2015, c’était un peu mieux : 1700 tonnes. 2016 devrait être un bon millésime : 2800 tonnes sont espérées par ces mêmes sauniers de la Coopérative, lors du charroi qui débute lundi prochain et qui durera une quinzaine de jours.
Les gros tas se voient de loin sur les bosses des marais salants.
Tous les jours j’apprends de nouvelles choses… Cet été, quand il faisait très chaud, les sauniers étaient obligés de revenir plusieurs fois par jour dans leurs marais qui donnaient à gogo. Ils disaient que les marais commençaient à s’échauder. Encore un nouveau mot pour moi !
L’explication relève de la savante alchimie du grain de sel. Il se compose principalement de chlorure de sodium, de chlorure de magnésium et de sulfate de magnésium. Avec en plus des minéraux. Les proportions sont précises pour que ce grain de sel soit parfait. Lorsque la période de récolte s’étend sur une longue durée, les eaux du marais sont sursaturées. C’est ce qui provoque l’échaudage. Le sel peut alors devenir inconsommable, car la proportion des composants est déséquilibrée, en particulier il se charge de chlorure de magnésium.
Par deux fois, il a bien plu, en juillet et en août. Grâce à cette eau douce opportunément tombée du ciel, le marais s’est ré-équilibré tout seul, il s’est reposé, et les organismes des sauniers également.
Personnellement j’étais contente pour mon jardin qui souffrait de déshydratation !
Jusqu’à quand peut-on tirer du sel ? Jusqu’à ce que la pluie vienne tout stopper et que le grain de sel ne se forme plus. Des Anciens, racontent qu’en 1950 ils ont tiré du sel jusqu’à Noël ! S’il ne pleut pas en abondance, et que le vent souffle de l’Est, la saison de gros sel peut encore durer. Par contre, la fleur de sel n’aime pas l’humidité.
A tous, bonne Fête du sel ! Rendez vous samedi prochain sur le port d’Ars.
