Vous connaissez sans doute la voix de Catherine Salez. Depuis onze ans, elle a elle-même fait découvrir des voix. Elle a animé plusieurs émissions sur Soleil de Ré, la radio locale associative de l’île de Ré, 104.1 FM.
Catherine a décidé de passer la main. De ses onze années de radio, les souvenirs fusent.
A priori, rien ne la prédestinait à devenir intervieweuse. Le hasard et les concours de circonstances font bien les choses. « En 2004, j’ai rencontré Richard Adaridi. Il avait pour projet de créer une radio rétaise, il m’a demandé de lui donner un coup de mains pour rédiger ses statuts. J’étais avocate, j’ai volontiers accepté. Je me suis retrouvée présidente de l’association ».
En 2005 et 2006 Soleil de Ré n’émettait que temporairement, et seulement pendant six mois. L’installation de l’antenne sur le château d’eau de Loix, qui dépendait du Syndicat des Eaux, a été épique. Catherine se souvient des multiples démarches menées auprès du sénateur Michel Doublet. Et même des interventions de son époux Jean-Jacques Vergnaud, auprès de Jean-Pierre Fourcade, ancien ministre. Une sacrée histoire, une vraie aventure…
Lorsqu’une fréquence pérenne est devenue disponible, après appel à candidatures, le CSA autorise Soleil de Ré à émettre toute l’année, en décembre 2006.
Catherine raconte un de ses moments de surprise : « Dès le départ, il a fallu montrer que nous étions des pros ! Un jour, sans me prévenir, Richard me colle le micro dans les mains, il me dit vas-y, créé ta propre rubrique. Ah bon, ah bon … En tant qu’avocate je savais m’adresser à un public dans un prétoire, mais je n’avais jamais parlé dans le poste ! J’avais tendance à parler haut, j’ai dû baisser ma voix. Richard m’a appris que la radio c’est un chuchotement. Les trois premières années, de 2007 à 2010, six jours par semaine, j’animais une rubrique de dix minutes, insérée dans la matinale ».
Je me suis amusée à faire le calcul du nombre d’interviews réalisés par Catherine durant cette période : 52 semaines X 6 jours X 3 ans = 936 interviews. Ce pouvaient être des portraits ou bien des sujets d’actualité. Un bon début pour quelqu’un qui n’avait jamais fait de radio auparavant ! Les interviews étaient enregistrées, ce n’était pas du direct. « J’apprenais….» confie-t-elle sobrement.
A cette époque, on a aussi beaucoup vu Catherine sur le terrain. Inlassablement, elle réalisait des interviews en direct. Cinq ans de reportages, c’est formateur…
En 2007, les élections municipales sont un autre territoire qu’elle explore. « Nous avons mis en place une série spéciale d’émissions. C’était la première fois que les candidats-maires étaient interviewés sur leurs programmes et leurs motivations, dans un média autre que la presse. C’était un bel exercice pour eux et pour Soleil de Ré. Il fallait les mettre en confiance, en oubliant le micro. Il fallait pousser certains à la précision, les aider à s’exprimer clairement et de façon concise dans un laps de temps déterminé. Mon but n’était pas de les mettre en difficulté. Je ne suis pas journaliste, je suis intervieweuse » rappelle t-elle. « Je pense que la radio a beaucoup apporté aux candidats de l’île de Ré ».
Soleil de Ré a connu des moments difficiles, en particulier lorsque la radio a été mise en redressement judiciaire en 2009. Des problèmes de trésorerie, des problèmes de financement, des problèmes liées aux recettes publicitaires, des problèmes bien souvent inhérents à la vie quotidienne des radios locales associatives. « En tant que présidente, j’ai dû procéder à cinq licenciements, ça été très dur… ». Depuis, Soleil de Ré s’est redressée, et a terminé d’éponger ses dettes il y a quelques semaines. Il y a eu aussi des loupés techniques, des galères d’antenne, dûs à des défauts de matériel quelque peu vétuste.
En 2010, Catherine change de format d’émission. Les dix minutes quotidiennes se transforment alors en une heure d’interview hebdomadaire, Zoom Actu, le samedi, à 11 heures. Elle y questionne un invité durant une heure.
Elle quitte alors la présidence de l’association de la radio pour se consacrer à son émission, avec en parallèle l’écriture de romans. Un format long est encore un autre exercice radiophonique : « Faire longuement parler les gens, les écouter, ne pas leur couper la parole, relancer sur un point particulier… Il y a de bons clients, comme on dit, ceux qui ont le verbe aisé. Il y en a d’autres pour qui c’est plus compliqué pour les faire passer d’une réponse oui ou non à ma question vers une réponse plus étayée, pour faire développer leurs idées. D’autres invités sont difficiles à accoucher, par timidité, voire par jeu ».
Voilà autant de moments exaltants et satisfaisants : « J’ai souvent fait de belles rencontres. Lorsqu’au bout d’une heure, mon invité dit c’est déjà fini, je suis très contente ».
De la même façon, je me suis amusée à compter le nombre de Zoom Actu, de 2010 à 2016. 52 semaines X 6 ans = 320 interviews.
Qu’en reste-t-il au terme de ces années ?
« J’aime m’impliquer. Je n’ai jamais eu peur de me lancer dans les interviews. J’ai fait cela onze ans bénévolement, pour que l’association perdure. Et puis j’ai beaucoup appris quant au territoire de l’île de Ré. Quand j’étais avocate j’avais toujours un peu de tract, car j’avais une obligation de résultats et de moyens. Là non, je n’ai jamais eu de crainte. La radio c’est le direct, c’est le contact, c’est un média vivant, réactif, où les gens se sentent libres de s’exprimer. Il n’y a pas de caméra intimidante. En cours d’interview je peux faire des signes à mon invité ça ne voit pas et ça ne s’entend pas ! Je le porte, je le guide, je le soutiens si je le sens en difficulté ».
Pourquoi s’arrêter en si bon chemin, alors que la radio est devenue une composante de la vie de Catherine ? « Depuis un an, j’ai envie de décrocher de Soleil de Ré. J’ai besoin de renouvellement, de passer à autre chose, car je pense avoir fait le tour. Et puis surtout j’ai envie de continuer à écrire des romans à 4 mains avec Jean-Jacques Vergnaud. Concilier tous les aspects de la vie ce n’est pas toujours facile. Nous avons quitté Paris, nous nous sommes posés à Rivedoux pour trouver de la sérénité et le temps d’écrire. J’ai besoin de retrouver un peu de temps pour réfléchir à la suite ».
Quel est l’interview qui l’a le plus marqué ? « Celui de Geneviève Courbois, présidente de l’association les Enfants du Désert. Elle nous a vraiment embarqué dans un film radiophonique. Moi-même, je suis partie dans ses pas au milieu du désert, je n’ai pas pu couper le micro, les dix minutes se sont transformées en une heure ».
Quel est son ultime invité à Soleil de Ré ? « Maryse Maligne, chercheur en physique quantique a écrit un roman policier, titré Le tourbillon quantique. L’émission sera diffusée samedi 3 septembre, à 11 heures ».
Nous disons au revoir à Catherine pour Soleil de Ré. Le virus radiophonique semble quand même bien ancré en elle. Qui sait ce qu’elle nous réserve ? Pour le moment, elle anime l’émission Le Studio dans le cadre de la télé locale Ré-Télé créée par Yves Morin. Image + voix, un autre univers…
Merci à Catherine d’avoir plongé dans son album de photos, d’où sont extraites les images des années Soleil de Ré.