Au mois d’avril, l’équipe du Pays d’Art et d’Histoire de l’île de Ré a donné rendez-vous au public à l’occasion du Mois de l’Architecture et du Cadre de Vie. Cette manifestation est portée par la DRAC Poitou-Charentes (Direction Régionale des Affaires Culturelles).
Deux fois par semaine, à 18 heures, des rencontres-flash, d’une durée de 30 minutes, ont pris place dans un lieu de chaque village de l’île. Le thème retenu par l’équipe rétaise, « Quatre murs et un toit ». Elle fut un bon prétexte pour découvrir des maisons, des habitations, et surtout des architectures insolites et exceptionnelles. Au total, 700 personnes se sont déplacées, des touristes de passage, mais également pas mal de résidents, afin de découvrir des lieux de vie insoupçonnés de l’île de Ré. De belles surprises !
A chaque visite, un guide-conférencier du Pays d’Art et d’Histoire, muni de plans, de photos anciennes et de schémas, a évoqué le patrimoine, sous un angle architectural et historique.
Voyons donc ce qui se cache derrière les murs et levons ensemble le voile sur l’architecture rétaise.
SAINT-MARTIN DE RE : LA VINATERIE, DITE AUSSI LA VINATIERE
Hélène, conférencière du 3 avril, a indiqué :« Les maisons à pans de bois sont très rares à l’île de Ré, elles toutes sont implantées à Saint-Martin. Au Moyen-Age, il n’y a plus de bois dans l’île, tout a été coupé au profit des plantations de vigne. Au 16e et 17e siècle, on revient au bois pour construire les maisons, sans doute importé de Poitou-Charentes. Il devait être facile à se procurer, il ne coûtait pas cher et il permettait de construire rapidement. A cette époque, les maisons à pans de bois, étaient-elles nombreuses ? Nous ne le savons pas. Beaucoup ont dû être détruites lors des guerres de religion et au cours du siège du village. Le bois été utilisé pour la charpente et l’ossature. Le rez-de-chaussée de la Vinaterie est en pierre de taille et moellons, ainsi l’humidité ne remonte dans le bois et ne l’abîme pas. Le charpentier dessinait au sol la façade à l’échelle réelle. Comme un jeu de construction, il posait les pièces de bois les unes à côté des autres et il les assemblait pour les bloquer. La structure était ensuite hissée avec des cordes pour la mettre en place.
On peut supposer que La Vinaterie était un magasin au rez-de chaussée avec une vitrine s’ouvrant avec des volets horizontaux, avec un étalage pour proposer des produits à la vente. Dans son sous-sol, elle a pu être un entrepôt de vin pour les tonneaux embarqués dans le port. Au premier étage, l‘encorbellement permettait de compenser le parcellaire étroit de l’île de Ré en augmentant la surface d’habitation. La fenêtre est à meneaux, séparée en 4 parties. L’équipe du Pays d’Art et Histoire pense que la maison date du début du 16ème siècle ».
Hélène a lancé un appel car peu d’éléments existent sur cette maison. Ceux qui, par bonheur, en disposeraient sont conviés à se rapprocher de l’équipe du Pays d’Art et d’Histoire. « La couleur rouge fait partie des exceptions sur l’île de Ré. La frise de vigne a été rajoutée au 20e siècle » a-t-elle expliqué.
RIVEDOUX-PLAGE : LA BATTERIE
S’il y a un lieu que je ne soupçonnais pas, c’est bien celui-ci. Il ne s’agit pas de la Redoute, que beaucoup connaissent déjà. Lorsqu’on quitte le pont, tout de suite à gauche, à l’entrée de Rivedoux, en ouvrant bien les yeux des monticules de terre se distinguent. Ils font face à La Rochelle-Chef de Baie. Le terrain appartient au Conseil départemental, il est inaccessible au public. C’est ici que Guillaume, conférencier du 7 avril, nous a montré le lieu qu’ont occupé les Allemands pendant la guerre 39-45, pour leur défense anti-aérienne. Ici se situait le coeur de l’ouvrage militaire : vestiges de blockhaus, pièces d’artillerie, restes de rails sur lesquels circulaient des wagonnets, magasins à poudre et à obus, niches à détonateurs, abris en béton, casernements… Le site était relié par télégraphe à celui de la Redoute, lequel servait de poste d’observation des Pertuis, en complément du terrain militaire de Karola, situé à Ars.
Plus surprenant encore, la Batterie date de 1861. Sous les bosses se cache un fort d’inspiration médiévale, copie conforme de celui du Grouin, à Loix. En 1878, l’armée française l’a recouvert d’une énorme masse de terre, au-dessus et autour, de façon à s’enterrer pour se protéger de l’artillerie ennemie. La terre a été apportée du continent par bateaux. Sous ce lieu, existent 5 000 m2 de souterrains. « Depuis le 17e siècle et jusqu’à 1939, cette pointe de sable a toujours été un site militaire. Ce sont les ingénieurs militaires qui ont aménagé la première route et le premier appontement en bois » a indiqué Guillaume.
LA COUARDE-SUR-MER : LE FOUR A CHAUX
Sur la route départementale entre La Couarde et Saint-Martin, le bâtiment ne passe pas inaperçu. « Sur le cadastre napoléonien, ce four à chaux n’est pas représenté. On peut donc estimer sa construction vers 1840, liée au développement de l’industrie de la chaux. Son bâti est artisanal, il est construit en petits moellons, son volume est identique à celui initial. Autour, des bâtiments agricoles ont été édifiés pour servir d’entrepôts ainsi qu’une cuisine et deux chambres qui constituent l’habitation. Des photos, datant des années 70, montrent que des fenêtres ont été percées sur le côté et qu’autrefois, à l’étage, existaient vraisemblablement des greniers. A l’île de Ré il n’y a plus que deux fours à chaux, ici , et celui de l’Ancre Maritaise à Sainte-Marie de Ré mais qui n’a plus sa cheminée.
Au 19e siècle, la chaux est utilisée en agriculture pour amender la terre et la chaux vive pour des raisons d’hygiène. Elle servait aussi de mortier pour les constructions, elle était mélangée avec de l’eau et du sable. Les murs étaient chaulés de blanc afin d’assainir et donner une impression de propre.
L’industrie de la chaux était alors prospère sur l’île. Après la seconde guerre mondiale, les engrais, le ciment et le béton l’ont remplacée. Comment marche un four à chaux ? : on empile successivement des couches de calcaire concassé et des couches de combustible, par le gueulard, la partie haute. On met le feu dessous, et on maintient la température à 1000° pendant 3/4 jours. On ressort ensuite la chaux par le bas » a exposé Stéphanie, le 10 avril.
ARS-EN-RE : VVF VILLAGES LA SALICORNE
Je suis allée de nombreuses fois dans ce lieu, situé face au port. Mais jamais je n’avais perçu la démarche architecturale, telle que Stéphanie l’a présentée, le 14 avril.
« A l’initiative de l’équipe communale, le projet d’un Village Vacances a débuté en 1974. Il a été le premier de la sorte dans l’île de Ré. Trois ans plus tard, les tractations ont abouti à la création concomitante du VVF d’Ars et de celui de Sainte-Marie, comportant chacun 40 logements. La municipalité d’Ars misait alors sur le développement du tourisme afin de soutenir l’économie du village, avec en parallèle, la création de la base nautique. La commune était propriétaire du terrain et des bâtiments et elle assurait la maintenance du site. VVF a choisi l’architecte parisien, Bernard Canin, connu pour avoir conçu des logements sociaux et travaillé à l’étude de nouvelles architectures touristiques comme les cellules de loisirs légères que sont les mobil-homes et les chalets.
La petite superficie du terrain d’Ars, 1,5 hectare en centre bourg, a constitué une contrainte pour contenir les 40 logements, destinés à 4 à 8 personnes. Ici pas de duplex. Le VVF est construit tel un village, avec une placette centrale, les bâtiments se traversent par des passages qui débouchent sur l’extérieur. Vous remarquerez l’utilisation du béton bouchardé : murs, marches, rampes d’escaliers, bancs, rambardes des balcons. Les baies vitrées sont tournées vers l’intérieur du VVF. L’organisation des logements est fonctionnelle. Les espaces verts intérieurs ont été traités en déambulation conviviale, comme souvent en architecture de collectivités. Au cours de la tempête de 1999, beaucoup d’arbres sont tombés. La salle d’animation est restée dans son jus, telle qu’elle était lors de l’ouverture en 1982 : carrelage, plafond, luminaires, crépi intérieur, cheminée ».
Fin 2014, la commune d’Ars a vendu le site à VVF.
LE BOIS-PLAGE : LA DEMEURE DE LA CROIX-BLANCHE, DITE CORALIE
Le 17 avril, plongée en plein 18e siècle, avec Stéphanie. Une bien belle et grande propriété, construite en 1750, qui coupe le souffle une fois la porte franchie ! « En 1767, à la succession d’Etienne Chesneau, le domaine est ainsi décrit : « un logis entre cour et jardin, comportant trois pièces en rez-de-chaussée, dont une sert de cuisine, et plusieurs cabinets. A l’étage la configuration est la même. Sur la cour, des dépendances ». Les façades sont ordonnancées, alignées et droites, parfaitement symétriques, les ouvertures sont harmonieusement positionnées. En haut des murs la décoration est légère : gargouilles canon, et coquilles très prisées à l’époque.
Le jardin est divisé en trois parties, dont, de loin, on devine la symétrie : large perspective, bosquet, partie boisée. A cette époque, on joue sur la surprise et sur les recoins, les cachettes, les cheminements non longilignes. Au fond du parc on découvre un profond fossé arrondi et maçonné, nommé le Puits des amoureux. La légende familiale dit que Coralie est morte de chagrin, en raison du décès de son prétendant le jour des noces. Elle apparaîtrait, chaque année lors du jour anniversaire, vêtue de sa robe de mariée ».
Un énorme arbre attire l’attention des visiteurs : le photinia, planté au 18ème siècle, est splendide. Il a 300 ans ! Jadis le parc était planté de toutes sortes d’espèces : marronniers, chênes, aubépines… Une précision : le bassin à l’entrée du jardin n’est pas d’origine.
« L’ensemble est clos de murs, derrière lesquels étaient plantés des vignes et 800 arbres fruitiers, dont Monsieur Chesneau faisait négoce. Dans les murs aux extrémités du bosquet, deux portes cachent deux glacières. Ces tunnels, profonds et sombres, étaient utilisés pour conserver la glace. Elle était ramassée pendant l’hiver, sans doute dans un des bassins du fond du jardin accessible par un escalier, les blocs de glace étaient découpés puis on entassait de la paille par-dessus. En été, on disposait ainsi de glace pour faire des sorbets, dont les gens du 18 ème siècle raffolaient. Au gré des promenades dans le parc, le maître de maison en proposait à ses hôtes. A cette époque on aime aussi le vin glacé, et on peut imaginer qu’ici étaient stockés les fruits des vergers du domaine ».
Quand on passe côté cour, qui servait d’entrée principale, l’émerveillement se poursuit : « Les sources papier indiquent des celliers, dans lesquels un fouloir et un pressoir, une chaudière avec quatre alambics, des ponnes pour la lessive, un puits et une buanderie. Il y avait sûrement des écuries. Sur les côtés de la cour, on distingue encore les pavements de pierre originaux.
Après la mort d’Etienne Chesneau, le domaine a été vendu par sa fille à un riche négociant de Saint-Domingue. Il n’habitait pas à l’île de Ré et il en a donné la gestion à un membre de la famille de Nicolas Baudin, dont un frère, également riche négociant, rachète le domaine en 1789. La famille va le garder jusqu’en 1850. Ce genre de logis aussi bien conservé, est un exemple rare de nos jours dans l’île de Ré. Il y en avait énormément lorsque le commerce était florissant, les armateurs s’installaient ici et les ports rétais se développaient. Ces propriétés, en dehors des bourgs, étaient dites de campagne ».
La porte de la propriété se referme, quel magnifique retour sur le passé…
LOIX : LE MOULIN A MAREES
Le 21 avril, 140 personnes sont à l’heure dite, au rendez-vous fixé par Hélène. Elle raconte : « Autrefois Loix était une île. A marée haute, le seul moyen pour la rejoindre était le bateau, tandis qu’à marée basse, on pouvait l’atteindre par un sentier spécialement aménagé. Quand la marée monte dans la fosse de Loix elle dépose du sable et des graviers, quand elle redescend le sable stagne. Ce lieu s’est envasé au fil du temps, et les bateaux ne pouvaient même plus passer. Au 14e siècle, une écluse est construite. Elle sert à retenir l’eau à marée haute. A marée basse, ses vannes, les portes, sont ouvertes pour faire une chasse. Sous la pression, l’eau se déverse d’un coup et entraîne graviers et sable. Plus tard, un moulin à marées sera édifié juste à côté. Une roue à aubes, horizontale dans un premier temps, est installée pour rendre encore plus efficace l’entraînement de l’eau. Parallèlement, à cette époque, Loix se peuple, une église se construit, et il faut nourrir les habitants, quelque peu condamnés à vivre de façon autonome en raison de l’éloignement et de l’isolement. Deux moulins seront utilisés, un à eau et un à vent pour moudre le blé et l’orge produits par les Loidais.
Qui gérait ce moulin ? L’abbaye de Saint-Michel en l’Herm, en Vendée, en était le propriétaire. Elle louait les terrains du moulin à un fermier. Lui même sous-louait à un meunier qui lui payait un loyer plutôt substantiel. Le farinier devait entretenir le moulin, ouvrir et fermer les vannes pour chasser l’eau de mer, et s’assurer que la réserve d’eau alimente bien les marais salants situés juste derrière. Les archives des contrats de l’époque témoignent que le meunier ne devait débourser aucun centime. Lorsque des réparations sur le moulin à marées s’avéraient nécessaires, il faisait appel au fermier. Au delà de 1000 livres, l’Abbaye payait le supplément.
Sous le toit, dans le faux-grenier, le meunier versait les grains de blé dans un grand entonnoir. A marée descendante, la vitesse de la roue à aubes faisait tourner un axe, qui entraînait deux meules en pierre au milieu desquelles le grain était broyé et transformé en farine.
Après la Révolution, le moulin est devenu Bien national. En 1823, une nouvelle roue à aubes, verticale, a été installée. Le moulin a alors servi de laverie pour blanchir le sel tiré dans les marais salants environnants ».
A l’île de Ré beaucoup de ces moulins à marées existaient. Celui de Loix est le seul encore en fonctionnement. De nos jours, c’est une propriété privée. Des chasses d’eau sont assurées régulièrement par la commune afin de juguler l’envasement de la Fosse de Loix.
SAINT-CLEMENT DES BALEINES : LA CABANE DES SAUNIERS
C’est dans le centre du bourg que rendez-vous était donné le 24 avril par Hélène pour aller visiter, à vélo, le champ du marais salant de Pascal Dufour. « Du 15e au19e siècle, 30 000 tonnes de sel étaient produites par an, tous marais de l’île de Ré confondus. Ce commerce était important car le sel servait à la conservation des aliments. Cependant les sauniers avaient une autre activité à côté, les revenus du sel n’étant pas suffisants. Le travail dans le marais est difficile. Aujourd’hui on compte 90 sauniers : soixante adhèrent à la Coopérative, et une trentaine sont indépendants. La plupart ont, comme par le passé, une activité complémentaire.
Trois types de cabane de saunier existent. Elle sert au saunier pour y faire des pauses, à l’abri du vent et du soleil, et pour y ranger ses outils.
– Le trou bâti : un trou est réalisé dans la bosse du marais. Deux murs en moellons sont maçonnés, ils retiennent le talus de chaque côté. Les murs intérieurs sont recouverts de chaux. Dans le fond on trouve parfois une cheminée pour se chauffer la nuit lorsque le saunier restait ici pour dormir et être d’attaque dans le marais de bon matin. Un toit en tôle est posé dessus, il est quelquefois recouvert de tuiles.
– La cabane en bois : son ossature est composée de poteaux au milieu. Un bardage vertical est posé tout autour et dans les angles.
– La cabane en moellons : c’est celle qui existait au 19e siècle. Souvent installée au milieu du marais, elle est encastrée dans la terre, à mi-bosse. On y voit par endroits des restes de chaux. A l’intérieur des moellons ressortaient, ils servaient d’assise, pour se réchauffer près de la cheminée. La porte centrale est en bois, souvent de vieilles portes récupérées. Il y avait des fenêtres avec huisseries ou bien des trous dans les murs ».
LES PORTES-EN-RE : LE PHARE DE TROUSSE-CHEMISE, DIT LE FEU DU FIER
Le 24 avril, Stéphanie nous a ouvert les grilles de ce site, propriété du Conseil départemental : « Au 18e siècle, la navigation a pris son essor, mais les naufrages étaient nombreux. Les amers traditionnels (clochers, toits de moulins) n’étaient pas toujours pas visibles, surtout la nuit. En 1811 une Administration générale est créée pour gérer les phares et balises. En 1822, Fresnel invente une lentille dont le faisceau équipera les grands phares. En 1866, le conseil municipal des Portes demande à l’Administration l’installation de feux à Trousse-Chemise. Pour rentrer dans le chenal d’Ars, le passage pour les bateaux est très étroit, entre le banc de sable du Bucheron et la roche de Loix. Des balises existaient à l’entrée du port d’Ars, mais elles ne fonctionnaient pas bien. En 1870, un décret impérial de Napoléon III autorise la construction de deux feux : la maison-phare et dans l’alignement, un second fanal, monté sur rail, qui renvoie le signal. Le terrain appartenait à l’Administration des forêts chargée de la plantation d’arbres sur les dunes, elle cède une parcelle de terrain aux Phares et Balises. Sur les cartes postales du début du 20e siècle, on constate qu’il n’y avait pas de végétation entre les deux feux. En 1874, suite à un appel d’offres, un entrepreneur d’Ars, Mr Favreau, est chargé de la construction du phare. Budget : 15 000 F. Le phare sera mis en feu le 1er septembre 1875.
Un modèle-type est fourni par l’Administration centrale car la construction est extrêmement normée : format de la maison-phare, taille des pierres, couleur de l’enduit, matériaux, où aller les chercher, taille des ouvertures et des volets… Pas de place pour la création artistique ! Et même l’habit du dimanche du gardien de phare, y compris son canotier, est normé… La réalisation de ces bâtiments est de grande qualité, elle est fixée par le cahier des charges : pierre de taille de Crazanne pour les encadrements de fenêtres et la corniche, granit de Bretagne pour les marches, petits moellons pris sur les côtes des Portes, sable prélevé autour du chantier, enduit-crépi de couleur ocre, toiture de tuiles plates fabriquées à Angoulême, gris-vert pour la couleur des volets, table armoire pour la lanterne… 150 phares de ce type ont été ainsi construits, mais c’est le seul encore existant en Charente-Maritime.
Le rôle du gardien du phare : éteindre, allumer la lanterne, vérifier qu’elle ne s’éteigne pas pendant la nuit. Il habite donc ici, dans un logement sommaire détaillé dans les archives : cuisine, chambre, magasin aux huiles pour allumer la lanterne, bureau, échelle de meunier pour monter à la lanterne. Le logement du gardien est livré meublé, la liste est précise y compris les ustensiles de cuisine. Le drapeau français est également fourni. En 1879, le logement a été agrandi à l’arrière avec chai, pressoir, arrière-cuisine, citerne d’eau pour que gardien puisse vivre dans une certaine autonomie. L’eau courante et l’électricité ont été amenées en 1966. En 1952, Monsieur Poulet a pris le poste de gardien, il est resté là jusqu’à sa retraite en 1985. Il a été le dernier gardien du phare. La lanterne a été ensuite retirée ».
Une visite exceptionnelle avec explications nombreuses et détaillées. Un petit regret pour tous : dommage de ne pas avoir pu visiter l’intérieur de la maison.
SAINTE-MARIE DE RE : LA MAISON DU MEUNIER
28 avril, ultime visite. Stéphanie, nous ouvre ses portes de la maison du meunier : « Les écrits mentionnent que dès le 15ème siècle des moulins ont existé à l’île de Ré, à Ars notamment. Cependant ils se sont plutôt développés dans la deuxième moitié du 17ème siècle. En 1702, une carte de Sainte-Marie de Ré montre la présence de plusieurs moulins à l’extérieur du bourg. Sur les plans, ce moulin est dit Moulin Notre Dame, abbaye de Sainte-Croix, il daterait de 1660-1670. Au 19e siècle on dénombrait une centaine de moulins sur toute l’île.
Aujourd’hui le chapeau, la toiture conique, et les ailes de ce moulin ont disparu. Un mât y était accroché, il permettait de faire tourner la toiture pour axer les ailes au vent. Un mur bas entourait le moulin, avec un large espace, un cerne, pour sécuriser le lieu lorsque les ailes tournaient. Le moulin avait deux entrées face à face. A l’intérieur, au premier niveau la farine était stockée, au niveau intermédiaire se situaient les meules pour écraser les grains, et au dernier niveau le grain était versé par le haut. Dans la partie supérieure du moulin, de petites ouvertures permettaient de hisser le grain par l’extérieur. Elles servaient aussi à surveiller à la fois le bourg et la mer. Les Maritais apportaient au moulin leur récolte d’orge, la plus importante, et celle de blé, ils en faisaient ensuite du pain noir et du pain blanc . En contre-partie le meunier gardait une part de farine. Il avait souvent une activité annexe : vignes ou marais salants, sachant qu’il n’était pas, la plupart du temps, propriétaire exclusif du moulin et qu’il devait payer un fermage.
A proximité, la maison du meunier est toute simple. François Chevalier, mort en 1878, est la dernière personne à l’avoir habité. Ses descendants en ont fait don à la commune de Sainte-Marie, qui l’a rénovée.
« Le cadastre napoléonien, de 1846, montre ce qu’était la maison du meunier. Aujourd’hui la moitié du logis subsiste. Il n’y avait pas toutes ces habitations autour. Imaginons une bâtisse de 3 pièces, un cellier pour le stockage, des dépendances, une écurie, un chai et un jardin à l’arrière avec un puits. Les murs témoignent que la maison a été plusieurs fois remaniée. Au pied de l’ancienne porte d’accès, il reste des pavés. Les encadrements sont en pierre de taille, avec un arc arrondi, et un fronton, ils montrent le soin apporté à la réalisation de cette ouverture. Deux marches descendent dans la maison. Elle est construite basse, afin de ne pas gêner le fonctionnement du moulin. Un des murs intérieurs atteste que la toiture a dû être rehaussée ultérieurement ».
Les services techniques de la commune de Sainte-Marie de Ré ont aménagé et décoré l’intérieur avec des meubles rustiques et des objets d’artisanat populaire liés à l’activité du lieu. D’ici quelques mois, la maison devrait être intégrée à un circuit de visites patrimoniales, proposé par l’office de tourisme du village.
Un grand merci à Stéphanie Le Lay, responsable du Pays d’Art et d’Histoire à la Communauté de Communes, à Hélène Gaudin, guide-conférencière du service patrimoine de la CDC, et à Guillaume Cudennec, chargé de mission patrimoine à la mairie de Saint-Martin de Ré. Ils ont animé ces courtes découvertes architecturales, formidablement documentées, très intéressantes et riches d’informations. Elles ont été des parenthèses, de vraies petites bouffées d’oxygène. Ça fait un bien fou de s’évader dans le temps passé ! Le timing de 30 minutes a parfois été dépassé, car les questions du public fusaient de toutes parts.
Un autre visite de ce type a eu lieu à L’Abbaye des Chateliers à La Flotte, les 25 et 26 avril. Malheureusement, je n’ai pu assister. Elle était organisée par la Maison du Platin, avec la participation du Pays d’Art et d’Histoire.