Pêche à la seiche dans le Pertuis breton

La semaine dernière j’ai eu la chance d’embarquer sur le Pt’it Jules, le bateau de Hugues Moinard, un des deux pêcheurs professionnels de l’île de Ré.

Pour vous, amis du blog, j’ai donc testé une matinée de pêche artisanale à la seiche. Ce mollusque marin, dont le blanc est apprécié des gourmets, commence tout juste à apparaître sur les étals.

Six heures du matin, le port de Saint-Martin de Ré n’est pas encore réveillé. Moi aussi je dors encore…. Il ne fait pas chaud. Une heure de bateau permet de contempler les premières lueurs du soleil levant, une gentille houle me berce. Les deux pêcheurs, Hugues et Eric, sont à pied d’oeuvre. 

La seiche vient se reproduire à l’endroit où elle est née. Elle arrive sur les côtes rétaises vers mars-avril. Mais quand précisément ? mystère… Elle aime une mer calme, et ces derniers mois, elle n’a pas été trop gâtée de ce côté-là. Elle aime les courants un peu chauds, et là aussi ce n’est pas le cas, la mer est plutôt froide. Pour le moment la seiche se fait encore rare.

Certains particuliers la pêchent au casier, en déposant une femelle seiche à l’intérieur pour y attirer les mâles.

Aujourd’hui, c’est à la pêche professionnelle au filet que je vous emmène. La veille, Hugues Moinard a posé quatre filets au large des côtes de l’île de Ré. Il faut lever les filets de pêche, les vider pour recueillir seiches et poissons, les débarrasser des algues  et des petites araignées de mer venues s’accrocher, les dénouer, les remettre en ordre, les ranger, puis les poser de nouveau en mer en prévision de la pêche du lendemain.


On ne connaît pas grand chose sur l’animal.  La seiche pond entre 200 et 300 œufs qu’elle dépose près des côtes. Les bébés seiches grandissent vite ; en quelques mois ils passent au stade adulte. Généralement, le mâle meurt peu de temps après l’accouplement, et la femelle peu après la ponte. Une seiche vit un à deux ans maximum.

Son bec est terrible, n’essayez pas d’y mettre les doigts lorsqu’elle encore vivante. Quand elle mord, elle peut entamer le ciré du pêcheur ! Ses tentacules portent des ventouses, elles lui permettent de maintenir fermement ses proies. Hugues me raconte que la seiche est vorace, il arrive même au mâle de tuer la femelle…. en lui déchirant la tête. Oh la pauvre ! Elle se nourrit essentiellement de crustacés et de poissons, qu’elle déchiquette avant de les avaler par petits morceaux. 

La seiche a un os, c’est comme une coquille interne. Il lui permet de flotter sans effort à n’importe quelle profondeur, sans être obligée de nager en permanence. Son moyen de locomotion est unique dans le monde animal : la propulsion à réaction. 

 

 

 

Elle nage en expulsant l’eau par un étroit tuyau, appelé entonnoir. Elle aspire l’eau dans une cavité de son manteau pour alimenter ses branchies en oxygène.

 

 

 

La seiche est un vrai caméléon. En quelques secondes elle change de couleur pour se fondre dans le décor marin et se faire oublier avant d’attaquer sa proie. Le mâle est marbré, la femelle est plus petite et plus claire.

Encre de seicheElle a une autre particularité : son encre. Une poche, une glande, en est remplie. Lorsqu’elle rencontre un adversaire, la seiche lui envoie un nuage d’encre dans lequel elle se dissimule pour s’enfuir avant d’aller se cacher.

 

J’ai bien sûr souhaité voir la seiche en train de rejeter son encre. Il paraît qu’en lui caressant le ventre et le dos, ça marche ! Les deux pêcheurs ont gentiment tenté l’expérience.

Après cette « leçon de choses », revenons à la pêche. A bord, pas de temps mort. Outre la seiche, il y a aussi des poissons retenus dans les filets : soles, bars, mulets, turbots, barbues…

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Une fois tous les filets relevés et les poissons triés dans des bacs, il faut passer à la suite : vider les poissons et casser les os des seiches. Ça se fait en mer, en même temps que le bateau roule. Les mouettes arrivent en escadrille pour saisir les entrailles au vol.


Retour à terre. Il est midi. Il faut maintenant préparer les seiches pour la vente aux consommateurs, le même soir.

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Le nettoyage est un sacré travail. Les têtes des seiches sont également soigneusement préparées, elles font le bonheur des amateurs de tapas. Le dépeçage rapide demande d’avoir le geste sûr et expérimenté.

13 heures, la journée n’est pas terminée. Le bateau est soigneusement rincé pour ôter l’encre qui a giclé partout !  Embarquement de la pêche en camionnette, direction Ars-en-Ré où la pêche sera vendue ce soir sur le quai. Les clients attendent avec impatience le retour du pêcheur.

Du pêcheur au consommateur, il faut être costaud pour endosser ce métier artisanal…

 

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Après, il ne reste plus qu’à déguster la seiche. Elle s’accommode de mille façons : le blanc peut être grillé, en sauce, en matelote, en beignet, en salade, en ragoût…

Les vieux Rétais pure souche disent : « Je mangerais bien un sot(e) de seiche », en prononçant le « e »,  c’est le mot qu’ils utilisent pour désigner ce fameux blanc tant prisé.

 

 

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