J’ai déjà suivi les pompiers en manoeuvres. Je les ai vus recevoir des médailles. Mais jusqu’à présent, je ne les avais jamais vus en intervention incendie, in vivo. Mardi, de bon matin, l’occasion m’a été donnée d’observer les pompiers volontaires de l’île de Ré éteindre un important feu.
A 6h30, alerte ! Une cabane ostréicole brûle au Pont du Feneau, à Loix. Merci à Yves, pour sa photo, prise alors qu’il se rendait à son travail à Saint-Clément des Baleines.
Ce matin-là, le vent d’Ouest souffle fort, très fort. Certes moins que la veille mais au moins à 80-90 km/h. Les flammes détruisent la cabane ostréicole de Jean-Luc Bourget. Elles se voient de loin, me dit-on…
Trois camions d’incendie et un véhicule de commandement arrivent dans les 20 minutes qui suivent l’alerte. Le PC de La Rochelle qui a reçu l’appel envoie des forces d’Ars, du Bois et de Saint-Martin.
Quand j’arrive au rond-point de Loix, je vois une ambulance qui part vers Saint-Martin. Je m’inquiète, je me dis qu’il s’est passé quelque chose de grave. Mais non, il n’y a pas de blessé. J’ai la réponse en arrivant sur place.
Face à un tel cas, la procédure des pompiers est bien planifiée. Une ambulance a été demandée par Michaël Morin, lieutenant de la caserne d’Ars, qui dirige les opérations. En effet, d’emblée les pompiers ont découvert une voiture, porte ouverte, dans l’enceinte de l’exploitation. Quelqu’un est peut-être dans la cabane ?
La voiture repérée s’avère être posée sur des cales. Le bâtiment est vide. Une fois ces vérifications actées, Michaël Morin fait repartir l’ambulance à Saint-Martin.
Seize pompiers sont sur place. Ils s’assurent qu’il n’y a pas de risque d’explosion. En langage des pompiers, on appelle cela la coupure des énergies. La présence de bouteilles de gaz et de bidons d’essence pour les moteurs des tracteurs est détectée. Tout est déplacé à l’extérieur.
A cet endroit, près de la piste cyclable, en plein marais, la plus proche bouche d’incendie est à 500 mètres. Elle se situe au virage devant l’Ecomusée. Après Xynthia, la commune l’a fait installer au bord de la route il y a trois ans. Elle a déjà prouvé son utilité.
Le chef décide de mettre en place une noria de camions à partir du point d’eau afin d’alimenter le fourgon sur lequel sont branchées les lances. Au final, ce seront six remplissages de camions qui seront nécessaires…
La cabane est en parpaings, la structure métallique de soutainement de la toiture fond sous l’effet de la chaleur. Le toit de la cabane s’est effondré, les tuiles sont tombées.
Minute après minute, le feu est maîtrisé. Tout indique que ce type d’intervention a été minutieusement envisagé par les pompiers. Les gestes ont été répétés, maintes fois, au cours des manoeuvres d’entraînement que les pompiers accomplissent régulièrement toute l’année. Les actions s’enchaînent les unes après les autres, méthodiquement et calmement.
Au bout d’un certain temps, le vent s’apaise un petit peu, mais il attise encore les flammes. Le risque que le feu se propage aux marais alentours est grand. Comme dans toute cabane ostréicole, il y a tout autour des tas de poches en plastique, utilisées pour l’élevage des huîtres. Bien évidement elles prennent feu, elles aussi. Fort heureusement les bosses des marais sont humides, à cette saison. Le périmètre est circonscrit.
En parallèle, un véhicule est arrivé depuis la caserne de La Rochelle. Les pompiers de l’île de Ré disposent de quelques bouteilles d’air, mais elles ne sont pas en nombre suffisant, face à cet incendie conséquent. Ils en ont besoin d’un peu plus, pour sécuriser les voies respiratoires des soldats du feu, car les fumées des plastiques sont toxiques.
A force d’allers et retours des camions depuis la borne d’eau, l’incendie de base est quasi éteint. Les flammes s’atténuent. Mais il reste à stabiliser le feu, comme l’explique Michaël Morin, un peu plus d’une heure après le début des opérations. Et de procéder alors à la phase de déblais, comme ils disent. Un pompier gratte avec un râteau, pendant qu’un autre utilise la lance à eau. D’autres s’activent à éteindre les braises sur des morceaux de bois et des morceaux de ferrailles.
Le jour se lève, les dégâts commencent à se percevoir. Il ne reste plus grand chose de la cabane. 24 000 litres d’eau ont été projetés.
Les gendarmes de Saint-Martin sont rapidement présents sur le terrain. Comme pour tout sinistre, ils procèdent aux premières investigations.
Le maire de Loix, Lionel Quillet, est arrivé sur les lieux dès les premières flammes. Dans son gilet jaune, il fait la circulation, plutôt dense à l’heure des départs au boulot.
Le car de ramassage scolaire va chercher les enfants d’Ars pour les emmener à la maternelle de Loix. J’imagine la tête qu’ils vont faire, et les questions qu’ils vont se poser, en passant devant ce qu’il reste de la cabane.
A 8h45 je quitte les lieux, les pompiers poursuivent leur intervention. A 9h45, je les croise sur la route, lorsqu’ils rentrent à la caserne d’Ars. Mission accomplie. Toutefois elle n’est pas complètement terminée. Les engins doivent être nettoyés et re-conditionnés. Ce sont encore deux heures de travail supplémentaires…
Non, ce n’était pas une manoeuvre, mais bien la réalité. Nous avons de la chance d’avoir des équipes de pompiers au quotidien, toujours prêts. Chapeau messieurs ! Chapeau mesdames ! Toute l’année, vous êtes là, oeuvrant pour la communauté rétaise, sur un simple coup de bip, lorsque vous êtes d’astreinte. Bravo et merci, encore merci !
Et puis j’ai un pincement au coeur. Une cabane ostréicole est détruite. Celles qui restent sur l’île de Ré ne sont plus très nombreuses. Alors qu’il est difficile pour de jeunes et nouveaux exploitants de marais de s’installer…